[ #HistoiresExpatriées ] Ma nouvelle routine…

 

 
https://occhiodilucie.com/
 
(édition n°402/2018)
(avec pour marraine Val Edmond, expatriée en Angleterre)

Thème proposé

MA NOUVELLE ROUTINE

 
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Partir vivre à l’étranger peut être à la fois grisant et source d’appréhensions. Forcément, quand on part vers l’inconnu, ne sachant pas vraiment à quoi s’attendre, on s’en fait une vague idée très subjective (et bien souvent fausse). C’est d’autant plus vrai lorsque la culture et les modes de vie du pays d’accueil sont aux antipodes des nôtres… La plupart du temps, les idées reçues tenaces et les préjugés à l’emporte-pièce qu’on peut avoir avant de se retrouver en immersion pour de bon, volent en éclat assez rapidement une fois sur place. Le choc des cultures est incontournable, intense et puissant. En tout cas, c’est comme ça que ça s’est passé pour moi en m’expatriant un temps en plein cœur du Sénégal.

Alors afin de s’adapter au mieux à ce nouvel environnement de vie plus ou moins aventureuse, on tente tant bien que mal de se recréer une sorte de nouvelle routine, histoire de se rassurer. Sauf que parfois, tout ne se passe pas tout-à-fait comme on l’aurait imaginé…

Dans la première édition des #HistoiresExpatriées, j’ai déjà raconté certains aspects du quotidien avec lesquels il a fallu composer tant bien que mal.
J’y ai ainsi évoqué : l’eau courante et l’électricité alternative dans notre logement, l’ambiance sonore environnante, la cohabitation incontournable avec les insectes et les animaux, le respect des coutumes imposées aux expatriés, les joies des aléas climatiques saisonniers.
J’expliquais aussi comment on faisait pour se déplacer sans véhicule personnel, pour faire ses courses, pour se divertir et se restaurer, et enfin pour se soigner.

Voici donc quelques anecdotes complémentaires, ainsi que d’autres facettes qui constituaient notre nouvelle routine au Sénégal…

Nuits magiques…

Une des difficultés, compliquée à gérer, a été d’avoir très peu de nuits de sommeil relax, reposantes et réparatrices.
Plusieurs raisons à cela.

Coupables n°1 : les insectes en général (très agréable d’être réveillé en sursaut par une énorme blatte qui, après s’être baladée sur ton corps, finit par se coincer entre deux orteils !), et les moustiques en particulier. Eux, s’ils ne te refilent pas le paludisme, finissent par te rendre dingue (dengue ?) ! Déjà très sujette à leurs piqures en France, là-bas leurs escadrons ne m’ont laissé aucun répit : j’étais leur OpenBar ambulant HappyHour permanent ! J’étais dévorée de la tête aux pieds, les démangeaisons étaient insupportables avec la chaleur et la sueur !
Les répulsifs étaient inefficaces.
Il faisait tellement chaud la nuit qu’il était impossible de dormir sous la moustiquaire.
On passait nos nuits à vider des bombes de “yotox” (le baygon local). Mais ça ne servait pas à grand-chose, les moustiques y résistaient, par contre nos poumons beaucoup moins… Seuls des fumigènes en spirale qu’on faisait brûler semblaient calmer les assauts effrénés, sauf qu’on s’asphyxiait en même temps que les moustiques tellement la fumée toxique dégagée rendait l’air irrespirable dans la chambre !

Coupable n°2 : la chaleur épouvantable qu’il faisait la nuit à Kaolack (1ère ville où nous avons habité au Sénégal) dans notre logement, sans clim ni ventilateur je le rappelle. Après des journées à plus de 40° à l’ombre, la nuit la température ne descendait guère en-dessous des 25° dehors. Mais dans le logement, les murs recrachaient la chaleur emmagasinée durant la journée. La pièce où on dormait était un véritable four.

Alors, pour essayer de faire baisser nos températures corporelles la nuit venue, on remplissait la baignoire (à l’eau brûlante évidemment, puisqu’on n’avait pas le choix de la température de l’eau au robinet) en fin de journée et on laissait tiédir l’eau. Et puis, pendant la nuit, on passait notre temps à se lever à tour de rôle pour aller se tremper, puis sortir du bain en s’agitant frénétiquement dans tous les sens, tout nu et tout mouillé, pour obtenir une sensation de fraîcheur très relative. Aaaaah, système D, quand tu nous tiens…
Lorsqu’on a déménagé à Thiès (la seconde ville où nous avons vécu au Sénégal), les températures étaient moins élevées. A tel point que certaines nuits, on avait même carrément froid et ça nous réveillait : un comble !

Coupables n°3 : les bruits nocturnes (en partie déjà raconté précédemment). Le logement étant ouvert aux quatre vents, sans vitres, il n’y avait aucune isolation phonique possible. On entendait donc parfaitement bien tout ce qui se passait aux alentours. On était même parfois aux premières loges pour profiter de l’ambiance du quartier. On a eu beau s’y résigner et finir par s’y habituer, c’était usant de devoir dormir en pointillés… quand on parvenait à vraiment s’endormir !

Coupable n°4 : le lit de compétition sur lequel on dormait : mention spéciale pour cette literie au confort ultime inimitable !
Sur un cadre de lit bancal, des planches étaient posées en travers sur l’armature. Elles faisaient office de sommier à lattes. Jusque-là, rien d’extraordinaire. Sauf que ces planches n’étaient pas clouées au cadre. Résultat : elles se baladaient toute la nuit au rythme de nos mouvements respectifs. En plus, comme il en manquait, ça faisait des trous. Le lit était complètement difforme, tout gondolé. Le matin, on retrouvait les planches du milieu contre celles des pieds, et du coup on avait le cul qui s’affaissait jusqu’au sol (position optimale pour le dos).
Sur ce sommier sommaire était posé un matelas en mousse synthétique pas très épais mais qui tenait bien chaud ! On transpirait tellement que quand on se tournait, le drap et le matelas nous restaient collés au dos.
Mais ne nous plaignons pas ! On avait la chance de ne pas avoir à dormir par terre ou sur un lit de brousse en branchage…


Coupable n°5 : la petite chatte qu’on avait adoptée là-bas ?. Quelques semaines après notre arrivée dans le pays, on a trouvé un chaton tout blanc sur un tas d’ordures à côté d’un restaurant. Il était tout seul, on a craqué et on l’a embarqué. On l’a appelé “toubab” (qui veut dire “le blanc” au Sénégal).
On découvrira plus tard qu’il s’agissait d’une petite femelle… qui n’a eu de cesse que de se reproduire dès qu’elle en a été capable !
Elle faisait pas mal de bêtises et vivait surtout la nuit comme beaucoup de chats. Ses allers et venues nocturnes dans la chambre n’étaient pas discrets, et elle prenait un malin plaisir à me réveiller en me pétrissant et “tétant” la nuque toutes griffes dehors.
Au petit matin, elle sautait sur la porte pour sortir, mais elle se retrouvait coincée, les griffes accrochées sur la moustiquaire, et miaulait jusqu’à ce qu’on se lève pour la libérer.

 
Cohabitation avec les bestioles…

Comme je l’expliquais dans la première édition des #HistoiresExpatriées, vivre en Afrique est synonyme de cohabiter avec la faune locale. On ne peut pas y échapper. Mais je dois bien avouer que les débuts ont été difficiles pour moi, et j’ai eu du mal à m’y faire.

Les murs de notre logement en portaient les stigmates ! J’avais tellement peur de m’approcher des insectes et des araignées que je leur balançais mes godasses dessus pour les écraser à distance. Je ratais la cible la plupart du temps, ce qui laissait une magnifique empreinte de chaussure sur la peinture murale. Quand finalement je visais juste, il y avait un gros pâté sur le mur après l’impact fatal ! Ne voulant pas décoller la charpie ensuite, les cadavres déchiquetés tapissaient les murs. Autant dire que j’ai refait la déco là-bas !!!
Chaque soir, en rentrant du boulot, Philéas comptait le nombre de trophées de ma journée de lutte meurtrière : les araignées sur les murs, ainsi que les énormes blattes éclatées par terre que je transformais en bouillie infâme…

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
gecko

Quant aux lézards, alors là, j’ai subi !

Il arrivait que des geckos dorment dans le lit avec nous. Je ne le savais pas sur le moment, mais je faisais un scandale lorsque Philéas me le signalait le lendemain matin.

Et quand des margouillats se baladaient tranquillement dans la maison, je devenais presque hystérique tellement je flippais (pour rien en fait…). Je m’enfermais dans une pièce et criais jusqu’à ce que Philéas dégage la bestiole. C’était pas de tout repos !!!

 
margouillat, surnommé “lézard pompeur”, version bleu électrique et jaune poussin. Il peut être aussi gris et vert pomme, ou bleu et rouge.
 
 
 

Histoires d’eau…

Lors de notre parenthèse expatriée au Sénégal, nous avons dû oublier le concept même d’eau chaude/eau froide. Nous étions tout simplement contents d’avoir de l’eau courante tout court dans nos deux pied-à-terre successifs.

Alors qu’à Kaolack, seule de l’eau salée bouillante sortait des robinets, comme je le racontais dans cet extrait du premier article #HistoiresExpatriées :

Autre petit “souci aquatique” à la maison : pas de notion d’eau froide. Durant la journée, les canalisations, surchauffées par le soleil de plomb et la chaleur accablante, nous distribuaient uniquement de l’eau brûlante au robinet (pratique pour se préparer un thé direct !). Il fallait attendre la nuit ou le petit matin pour avoir de l’eau tiède et espérer ainsi se laver sans risquer de se brûler au troisième degré ! Si on avait besoin d’eau froide, il fallait être patient, remplir un récipient et laisser refroidir… Mais au moins on avait la chance de ne pas avoir besoin d’aller chercher l’eau au “distributeur” du quartier ?.

…c’était l’inverse dans notre maison à Thiès : il n’y avait que de l’eau froide disponible ! On pourrait penser à priori que ça devait être mieux. Eh bien, paradoxalement, NON pas du tout ! Car il s’est avéré que devoir se laver à l’eau glacée est rapidement devenu notre supplice matinal quotidien. Certes après avoir supporté la chaleur de la journée, une douche fraîche était plutôt la bienvenue chaque soir. Mais le matin, c’était vraiment difficile. J’étouffais de petits cris dès que j’en arrivais au mouillage du ventre et du dos. Bizarrement, le plus dur pour moi était le lavage des cheveux : l’eau gelée sur le crâne, je le supportais difficilement.
Alors on a vite trouvé une astuce pour s’épargner ça : on remplissait des bouteilles en plastique, on les mettait dehors au soleil pour que l’eau se chauffe durant la journée, et hop le soir on avait de l’eau bien chaude pour se laver. Vive les joies du système D !!!

 
 
Manque d’équipements et tâches ménagères

Il a fallu vivre ailleurs, dans d’autres conditions, avec pas grand-chose, pour se rendre compte à quel point le confort (électro)ménager à l’occidentale est un luxe qui ne porte pas son nom… 

On fait partie d’une génération qui n’a pas vraiment connu le “avant”. Alors forcément on n’y prête pas attention. Et fatalement, on ne réalise pas la chance qu’on a d’être suréquipé à la maison. On en prend conscience le jour où l’on n’a plus à disposition tout ce matériel qui nous facilite la vie de tous les jours.

S’installer temporairement au fin fond du Sénégal (en 1994 je le rappelle, donc certaines choses, telles qu’internet et smartphones, n’existaient pas encore) est revenu à dire 《 au revoir, à un de ces quatre ! 》 au lave-linge, à l’aspirateur, au lave-vaisselle, au four micro-ondes, au congélateur, au mixeur/batteur, au robot de cuisine, à la cafetière, au grille-pain, à la table à repasser (le fer, on a pu en récupérer un d’occasion une fois sur place), à la télé, au magnétoscope, à la chaîne hi-fi, au téléphone fixe et au minitel, etc.

Autant dire que lorsqu’on n’a jamais fait sans tout ça, le manque se fait cruellement sentir très vite !
Pour illustrer jusqu’à quel point ça me montait à la tête, juste un petit exemple anecdotique très bête : là-bas, quand je préparais des carottes râpées, je finissais toujours avec au moins un ongle entaillé et le bout des doigts en sang en utilisant l’antique râpe-légumes manuel dont je disposais. Alors la nuit, il m’arrivait de rêver régulièrement que je râpais des carottes avec un robot de cuisine, ou encore que je me râpais de l’emmental sur des pâtes avec une moulinette à fromage… Et ces rêves-là n’étaient absolument pas des cauchemars !!!

A mes yeux, la pire tâche ménagère que j’ai eu à endurer reste la lessive à la main ! C’était surtout un calvaire quand il fallait laver les grandes serviettes éponge et les draps avec, à disposition, seulement deux bassines pas assez grandes posées dehors sur la terre, beaucoup de muscles et d’huile de coude, et de la lessive en poudre locale tellement “efficace” que les tâches disparaissaient à coup sûr… en même temps que le tissu qui les portait (et la peau des mains et des avant-bras !).
C’est en lavant des serviettes éponge à la main que tu prends conscience de leur super pouvoir absorbant : le poids que ça fait, une fois imbibé d’eau, est dingue ! On n’appelle pas ça “éponge” pour rien ! Sans compter que ça se rince difficilement, et obligatoirement en plusieurs fois. Et je ne parle pas de l’opération essorage à la main une fois tout ça rincé tant bien que mal, avec une mention spéciale pour essorer les draps d’un grand lit. J’en ai mal aux bras rien qu’en y repensant…
Heureusement pour moi, je n’ai eu à le faire que pendant quelques semaines après avoir déménagé à Thiès. C’est bien le seul point positif que je trouvais à ce qui nous avait été imposé en débarquant au Sénégal. En voici l’extrait déjà raconté :

Il a fallu consentir à se plier aux us et coutumes imposées aux expatriés : embaucher du personnel autochtone. Le minimum toléré était le combo 《 gardien + femme de ménage 》, mais il était encore mieux vu d’avoir aussi une cuisinière, une nounou, un chauffeur, un jardinier. Impossible d’y échapper, c’est la contribution incompressible au pays d’accueil et surtout le “prix de la tranquillité”
J’ai eu beaucoup de mal à accepter ça, la conception “avoir du personnel de maison” me mettant très mal à l’aise. Mais nous n’avons pas eu le choix. Comme nous n’avions vraiment pas les moyens de nous offrir la panoplie complète, nous nous sommes contentés d’embaucher à mi-temps une femme de ménage/lavandière/repasseuse et un gardien de nuit (ce qui n’a pas empêché d’être cambriolés à deux reprises, dont une fois en notre présence, en pleine nuit, après que les cambrioleurs nous ont “gazés” pour s’assurer de notre sommeil…).

 

Nouvelle routine dans nos déplacements

Après avoir déjà consacré un paragraphe détaillé expliquant comment on pouvait se déplacer, place maintenant à la description des routes sénégalaises et du contexte particulier pour le moins déroutant (c’est le cas de la dire !) auquel il a fallu s’habituer pour conduire à l’époque.
Beaucoup de choses sont toujours pareilles aujourd’hui.


Circuler était une aventure en soi et un dépaysement garanti. Tu avais une vague idée du moment où tu partais mais certainement pas quand tu arriverais !!! Les aléas et autres impondérables possibles et inimaginables étaient bien trop nombreux pour pouvoir prévoir quoi que ce soit

Ce qui surprenait d’abord quand on n’était pas encore habitué, c’était de constater à quel point les routes étaient fréquentées, quelle que soit l’heure. Il y avait toujours une multitude de gens y déambulant à pied, y compris en pleine nuit avec zéro visibilité. Dans les zones sans aucun village aux alentours en vue, on se demandait même d’où ils pouvaient bien sortir et où ils pouvaient bien aller comme ça.

Ensuite, on se rendait vite compte que la conduite allait forcément être rock’n’roll car il fallait composer avec les autres usagers (motorisés) de la route :
– [épaves de] voitures à la trajectoire imprévisible,
– [vestiges de] camions chargés plus que de raison menaçant de chavirer à tout instant,
– [carcasses de] taxi-brousse “7 places” croulant sous leurs chargements,

– [ruines de] cars-rapides (qui n’ont de rapide que le nom !) et de cars de brousse pleins à craquer avec des passagers dedans, dessus, pendus sur les côtés, arrimés à l’arrière. Ces gens sautaient en marche dès qu’ils étaient arrivés à destination, et il fallait faire attention de ne pas s’en écraser un au vol.




 

Niveau signalétique routière, il n’y avait aucun marquage au sol (très pratique la nuit pour se repérer et garder le cap) ni aucun panneau de direction (l’idéal pour se guider et savoir où on va). Comme le GPS n’existait pas, pour pouvoir se diriger il fallait donc avoir un sens aigu de l’orientation, ou alors une boussole greffée dans le cerveau, ou bien avoir des dons de divination.
 

Niveau revêtement, les routes (quand il ne s’agissait pas de pistes) étaient plus qu’irrégulières : pas de couche d’asphalte en continu mais des pointillés de plaques de goudron praticables ponctuées de nids de poule d’enfer. Parfois, c’était carrément des nids d’autruche vu la dimension impressionnante des trous. Il fallait imaginer les dégâts occasionnés sur le véhicule si on ne pouvait pas les éviter…

Une fois, on y a carrément laissé un pneu avec sa chambre à air, on s’était retrouvé à rouler sur la jante ! 
En général, dans le meilleur des cas, tout déplacement compte au moins une crevaison en cours de trajet.

Le but du jeu était donc d’éviter les trous sans finir dans le décor, et sans se prendre les véhicules (à la trajectoire très aléatoire) qui arrivaient en face.

 
Parce que là-bas, on cherchait avant tout à éviter les cratères. Par conséquent, les voitures d’en face devaient se pousser, sinon… La conduite consistait donc à slalomer et à planter de grands coups de frein. De temps en temps, il fallait rouler sur le bas-côté de la route, dans la terre ou le sable, si on ne voulait pas se faire écrabouiller par un camion.

 

 
Et puis la nuit, en plus de tout ça, il fallait être nyctalope pour pouvoir distinguer et voir à temps les piétons, les cyclistes, la faune et les charrettes dépourvus de lumières.

Évidemment, les routes et pistes sénégalaises ne sont pas seulement empruntées par des véhicules à moteur. Elles sont aussi le terrain de jeu de la faune domestique locale. Il y a toujours des chèvres, des moutons, des zébus, des ânes, des chevaux, des poules, des chiens errants. 

 

Il faut donc garder les yeux grands ouverts et la vigilance en état d’alerte maximal pour éviter de percuter ces animaux, ainsi que les charrettes bringuebalantes tractées par un âne ou par un cheval rachitique.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Pour éviter, autant que faire se peut, les collisions avec des bestiaux, le mieux était de se familiariser avec les habitudes comportementales de chaque espèce animale. Dès lors, on pouvait tenter d’anticiper la trajectoire et la vitesse de son propre véhicule.

Voici donc mon Petit guide (de survie) à l’usage du (courageux et aventureux) conducteur expatrié au Sénégal.

Sur la route, un âne reste figé à l’endroit où il a décidé de s’arrêter. Il est en arrêt sur image. Donc, dans la très grande majorité des cas, pour passer sans encombre, il suffit de ralentir et simplement s’écarter de sa zone de stationnement.

Pour les chèvres, c’est assez simple de les éviter aussi, mais pas pour les mêmes raisons. En effet, la chèvre conserve généralement sa trajectoire et sa vitesse. Sans faire de calculs savants, on peut être à peu près sûr qu’elle avance donc de manière constante. Là encore, il suffira de ralentir et de s’écarter à l’opposé de la direction choisie par le caprin.

Quant aux zébus, c’est un peu un mix de l’âne et de la chèvre, mais en beaucoup plus gros. Et comme bien souvent ils se déplacent en troupeau imposant, ils prennent tout l’espace et ne laissent donc pas d’autre choix que de s’arrêter et attendre qu’ils traversent, ou au mieux rouler au pas derrière eux.

 

En ce qui concerne les gallinacées et les ovins, alors là les éviter se joue un peu à la roulette russe ! Sur la route, les poules et les moutons sont des affolés hystériques, qui ne semblent obéir qu’à la théorie du chaos. Leurs déplacements sont on-ne-peut-plus erratiques, et leurs trajectoires sont totalement aléatoires et absolument imprévisibles ! Il est donc vain d’anticiper quoi que ce soit, il faut juste ralentir, éventuellement klaxonner (mais ça peut être contre-productif !!!) et espérer que la collision n’ait pas lieu, sinon…

 
Situations particulières moins courantes : on peut aussi parfois apercevoir des animaux sauvages beaucoup plus “exotiques” dans la région du Sénégal Oriental. Ainsi, en cas de conduite sur la route traversant le Parc du Niokolo Koba, il est possible par exemple de croiser des phacochères, singes, pintades.
Ces animaux sauvages étant très craintifs, généralement il n’y a rien à faire de spécial car ils disparaissent du champ de vision aussi vite qu’ils sont apparus. Sauf peut-être pour les pintades qui courent frénétiquement en zigzaguant plutôt que de s’envoler (?!?! la panique doit leur faire oublier qu’elles ont des ailes) ; il n’est donc pas rare de s’en ramasser une sur le pare-brise, auquel cas le prochain repas de la journée est assuré… mais chut ! Il ne faut surtout pas le dire car c’est formellement interdit puisque assimilé à du braconnage dans cette zone où la chasse, quand elle est autorisée, est très réglementée.


famille de babouins

Un coup de chance inouïe peut mettre sur son chemin des lycaons, habituellement rares et difficiles à observer. Dans ce cas, ouvrir grand les yeux car cette rencontre improbable est forcément furtive.

 
lycaons
lycaons


Enfin, si par le plus grand des hasards un lion apparaît au loin, il est vivement recommandé de s’arrêter  (et de rester dans son véhicule) pour savourer ce privilège inespéré
La population de lions au Sénégal est faible, à peine quelques dizaines, mais elle existe bel et bien. La plupart du temps, les rencontres impromptues avec le roi des animaux se produisent au beau milieu de la route vers Kédougou, aux heures du lever ou du coucher du soleil. Malheureusement, nous n’avons jamais eu ce privilège jusqu’à maintenant.

 

En résumé, la conduite au Sénégal n’est pas gage de sérénité… Il ne faut avoir aucun scrupule et ne jamais hésiter à se servir à outrance de son klaxon et de ses phares car ce sont les seuls moyens d’annoncer sa présence !

Bref, la routine #MadeInExpatriation peut parfois ne pas être de tout repos. Mais finalement, c’est ce décalage radical et déconcertant dans mon train-train quotidien qui m’a offert mes souvenirs les plus marquants (dans tous les sens du terme, c’est le moins que je puisse dire…) et surtout impérissables !!! Je ne serai jamais à court d’anecdotes à raconter à mes futurs petits-enfants ?…


 

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édition n°3 : Pourquoi es-tu partie ?
 
Toutes les autres participations abordant ce thème sont listées en fin d’article ici.

19 Comments on “[ #HistoiresExpatriées ] Ma nouvelle routine…

  1. ahahah pour ton histoire de carottes râpées à la main en 2018, on en reparlera quand tu auras mon âge et que tu changeras d'avis sur certains aspects (ou pas) du confort électroménager 😉 !!!! Tout évolue et comme on dit, seuls les cons ne changent pas d'avis 😀 !!!

  2. Oui, avec nos yeux d'occidentaux, ça paraît "terrible" comme contexte de vie de tous les jours. Mais il ne faut quand même pas oublier que c'est le contexte quotidien de la plupart des africains, ils ne s'en plaignent pas en ces termes-là, en tout cas pour l'immense majorité, car ils n'ont aucun point de comparaison avec nos visions occidentales. C'est pas mieux ou moins bien, c'est juste TRES différent donc incomparable. Peut-être que je raconterai cet aspect-là aussi : les préjugés dans l'autre sens qui m'ont fait halluciner lorsque je vivais là-bas… Le choc et l'incompréhension des cultures, dans les deux sens !
    Si j'avais su/compris ça au départ de l'action, le choc aurait été certainement beaucoup moins violent pour moi. Après, même si j'en ai chié (pardon mais j'ai pas d'autres mots !!!), j'ai préféré raconter tout ça avec beaucoup de (auto)dérision, car finalement c'est mon décalage avec tout ça qui me fait rire avec le recul. Sur le moment, raconter tout au second degré avec beaucoup d'ironie, c'était ma façon à moi de digérer ce que je vivais, ça me permettait d'encaisser les chocs en attendant que ça se termine !!!

  3. Ton quotidien était horrible, effrayant, fatiguant et tu racontes ça avec une bonne dose d'humour. Il a du falloir beaucoup de patience et de courage. Non mais les bestioles et les douches froides, l'horreur. Les sueurs froides sur la route (que j'ai connu en Inde). Par contre tu m'as fait rire parce qu'en 2018 je râpe toujours mes carottes à la main, au risque de me râper les doigts au passage. Mais rassure toi, j'ai un batteur électrique et une machine à laver. Même un lave vaisselle, luxe ultime. Je suis juste contre les robots cuisiniers.

  4. Oh my god c est tout sauf une routine ca dis donc ! Merci pour le partage et surtout pour l humour avec lequel tu racontes ca ! 😀

  5. Depuis que j'ai vécu ces situations, j'ai fait mienne la théorie de la relativité 🙂 !!! Comme toi qui a finalement trouvé que le Togo c'était "moins pire" que le Kirghistan du point de vue de l'accès à l'eau (je ne connais absolument pas ces 2 pays).
    Arriver à relativiser les choses, ça me sert encore beaucoup aujourd'hui plus de 20 ans après. Je trouve que c'est important de pouvoir mettre en perspective les choses. C'est ce qu'on a voulu faire avec nos enfants en les embarquant là-bas à deux reprises : depuis, ils ont bien compris qu'ils sont nés du bon côté de la barrière…

    Désolée si je radote, pourtant je fais de mon mieux pour faire juste un renvoi vers le lien d'autres articles parlant déjà d'un sujet. J'essaie de coller au thème donné pour chaque édition des #HistoiresExpatriées, mais c'est vrai que pas mal de choses peuvent être racontées dans différents thèmes proposés. Par exemple pour "La routine", j'étais embêtée car j'avais déjà parler de certaines choses dès la première édition.

  6. Sur certains côtés, tu me rappelles des souvenirs de mon séjour comme volontaire 1 mois au Togo. Enfin, sans l'accès à l'eau dans le logement (mais pas trop loin, on se plaint vite, mais 3 ans plus tard au Kirghizstan, j'ai pris conscience qu'au Togo, l'eau était finalement juste à côté).
    En tout cas comme tu le dis, ce sont ces situations que l'on ne risque pas d'oublier. Et je ne doute pas que tu as de quoi raconté longtemps sans avoir besoin de radoter !

  7. Je suis toujours aussi impressionnée par ces histoires sénégalaises, c'est sûr qu'avec tout ça la routine là-bas n'était pas monotone !

  8. C'est sûr qu'avec toutes ces bestioles… mais j'ai eu beaucoup de chance finalement car ma peur ultime c'est les serpents, et je n'en jamais vu un seul pendant tout le temps où on vivait là-bas !!! OUF !!!
    Par contre, je me suis rattrapée lorsque je suis retournée au Sénégal 15 ans après l'avoir quitté… lors d'un bivouac dans le parc du Niokolo Koba, j'ai passé la nuit allongée avec un python royal contre moi derrière ma toile de tente. Mais je ne savais pas que c'était ça!!! HEUREUSEMENT d'ailleurs sinon j'aurais fait une attaque de panique d'anthologie ??? !!!

  9. ton article m'a fait sourire, c'est tellement dur parfois de s'adapter ! Par contre à la première araignée j'ai failli arrêter de lire !!!

  10. Ha ha merci pour ton sens de d'humour. Les photos illustrent très bien tes propos �� tu vis vraiment quelque chose de différent ! Bravo à toi pour surmonter ces petits tracas du quotidien ��

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