Ushuaïa en Terre de Feu, au bord du Canal de Beagle.

 

(extrait de mon récit “Voyage jusqu’au bout du monde…“)

 

[…]
 
Ce tout premier jour en Argentine fut aussi long que la première nuit fut courte….
Lever à 4h45 le lendemain matin, avec en prime un bon jetlag dans les dents !
On prend conscience que ce grand voyage va être tout sauf reposant… Mais tout va bien, on est en vacances et on n’a rien d’autres à faire qu’à se laisser guider et profiter.

Départ pour USHUAÏA en TERRE DE FEU à l’extrême sud du pays : 2 500 kms parcourus en avion.
Le changement est radical ! D’abord il fait froid. Ensuite, la chose à laquelle je ne m’attendais absolument pas là-bas : Ushuaïa est au pied de montagnes enneigées… Je ne sais pas pourquoi mais je m’imaginais le bout du monde complètement plat en bord d’océan. Et bien pas du tout, on dirait les Pyrénées qui plongent dans la mer !

 
L’arrivée au bout du monde a été folklorique pour ne pas dire surréaliste ! Ce fut le coup d’envoi d’un sketch comique qui a finalement duré pendant tout le voyage et qui a fait mourir de rire tout notre petit groupe jusqu’à la fin.

L’aéroport d’Ushuaïa est tout petit, il y a seulement quatre avions par jour. Autant dire que se tromper de groupe de touristes, il faudrait vraiment le faire exprès… Et pourtant, notre nouvelle guide locale (une argentine ce coup-ci, pur jus du terroir) a douté…. longtemps…. en tournant ses papiers dans tous les sens….et ce malgré les preuves qu’on lui apportait sur l’identité de notre groupe…. Le doute l’a envahie à tel point qu’elle voulait s’assurer qu’il n’y avait vraiment plus personne dans la salle de débarquement. Sauf que la porte vitrée automatique ne s’ouvre que lorsque les voyageurs sortent, et elle, elle voulait rentrer alors qu’il n’y avait plus de voyageurs. Elle s’obstinait à avancer et reculer devant la porte, à faire des “coucou” de la main vers le détecteur de mouvement en haut de la porte vitrée, espérant déclencher l’ouverture…. ça faisait très caméra cachée, les fou rires ont commencé à fuser et à être contagieux !
Au bout de quelques minutes, voyant qu’effectivement il n’y avait plus personne dans l’aéroport à part notre groupe, elle s’adresse à nous un peu résignée :
<< Bon, je ne sais pas si vous êtes mon groupe, mais tant pis, je vais vous prendre quand même avec moi.
– aaaah muchas gracias, trop aimable !!!
– Vous allez à quel hôtel en fait ?
– euh….???…. l’hôtel Ushuaïa
– ah bon ? OK, on y va alors, on verra bien parce que je n’ai pas cette information moi. Suivez-moi, le minibus est garé dehors >>
(oui, dehors…. je vois mal comment il aurait pu être garé ailleurs que dehors…)

Il s’est avéré par la suite que notre guide avait vraiment beaucoup d’humour (à nos dépens même parfois…), elle était bien sympathique, mais malgré ça, on n’a jamais su si cette scène à l’aéroport était jouée ou bien spontanée !

Nous voilà ENFIN partis de l’aéroport direction Ushuaïa, la ville du bout du monde qui compte grosso modo 60000 habitants.
Encore une idée reçue totalement fausse que j’avais : Ushuaïa n’est pas un minuscule village de pêcheurs, mais une vraie ville tellement loin de tout qu’elle est très bien organisée et parfaitement autonome. Il vaut mieux….

 

 
Nous avons trouvé Ushuaïa surprenante et un brin déroutante. C’est comme une station de montagne mais au bord de la mer. Les maisons y sont colorées, aucun “building”, et malgré le climat il y a de la vie dans les rues à sens unique qui montent et qui descendent (façon San Francisco) jusqu’au port au bord du Canal de Beagle. Le port d’Ushuaïa est d’ailleurs très actif, et c’est notamment de là que partent tous les bateaux de croisière et les expéditions pour l’Antarctique distante de “seulement” 1000 kms.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Acte 2 du sketch à notre arrivée à l’hôtel…
Alors que nous admirions la vue panoramique imprenable d’Ushuaïa depuis le parking, notre guide ressort de l’accueil visiblement très embêtée et nous annonce sans se démonter :
<< – Bon, alors, on me dit qu’il n’y a plus de chambres disponibles.
– Comment ça “plus de chambres” ? C’est une blague ? Et notre réservation alors ?
– Montrez-moi les documents que vous avez parce que je ne sais toujours pas si vous êtes le groupe que j’attendais.
– ??????? >>
Après moultes discussions très animées entre la guide et le mec de l’accueil, le soulagement nous envahit tous…. Elle revient vers nous et nous dit :
<< – C’est bon, ils ont trouvé 4 chambres à vous affecter.
– comment ça “ils ont trouvé” ? L’hôtel n’est pas complet alors ?
– Si l’hôtel est complet. Mais on va supposer que votre groupe est bien celui qui a réservé pour cette nuit. Donc tout est OK, on prend les bagages, on s’installe et ensuite on va manger au restaurant en ville avant de partir en excursion. >>

Là encore, on n’a pas réussi à savoir si elle nous a fait marcher pour nous filer un petit coup d’adrénaline ou bien si la situation a été réelle…
Pendant tout cet imbroglio, le temps a subitement tourné et de gros nuages menaçants ont assombri le ciel. On commençait à se geler un tantinet…

Pas de chichis pour la chambre d’hôtel, juste le nécessaire pour passer une nuit. En revanche, la vue depuis la fenêtre valait le coup d’œil.

 
L’après-midi a été bien remplie et…..pluvieuse ! Là-bas, on nous a expliqué que la météo était tellement variable et imprévisible que les quatre saisons défilent chaque jour.
Nous avons fait une expédition au Parc National de la Terre de Feu. L’atmosphère était très étrange avec le temps brumeux, le crachin, le froid et le lieu si particulier. D’ailleurs, s’il n’avait pas fait ce temps, ça aurait moins dépaysant finalement. On se serait cru dans un film fantastique.
Bon, on n’a quand même pas fait du camping comme on en a vu ! Qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige, les gens qui vivent là-bas ne se laissent jamais abattre, et comme il fait rarement vraiment beau, ils sortent quelle que soit la météo…

On est allés jusqu’à la boîte postale la plus australe de la planète (c’est un fake en réalité puisqu’il en existe une en Antarctique…) où l’on peut se faire tamponner le passeport, et où j’ai posté une seule carte postale. Seulement une seule car je craignais que ce soit une arnaque à touristes et que la carte ne parte jamais… Et bien elle est arrivée en France avant notre propre retour, et surtout bien avant toutes les autres !

 

 

 

 

 

 

 
 
 
On a atteint la fin de la Route Panaméricaine, où il y a le départ pour une balade sur des passerelles (préservation de la nature… ils sont très écolo en Terre de Feu). Bien que la pluie se transformait en neige fondue, nous avons quand même fait le circuit d’où nous sommes revenus complètement frigorifiés, trempés comme des soupes, mais enchantés !

 
 
 
 
 
Le “Train du bout du monde” part aussi du Parc National de la Terre de Feu, et emprunte le rail construit par les bagnards au tout début du XXè siècle.

 
 
Au cœur du Parc, il y a un petit musée qui explique l’histoire de cette terre reculée et inhospitalière. Cette région a été baptisée “Terre de Feu” au début du XVIè siècle après sa découverte par Magellan, car les marins apercevaient de la fumée provenant des côtes.
A l’origine, c’était peuplé par les indiens Yamana. Aujourd’hui, il ne reste plus qu’une seule Yamana, une femme très âgée qui n’a pas d’enfants. Ce peuple s’éteindra avec elle.
Pour être tout-à-fait honnête, on reste très perplexe sur cette histoire de Yamana qui vivaient nus la plupart du temps… avec le froid qui règne ici… légende ou non ? On a eu beau nous expliquer qu’ils s’enduisaient et se nourrissaient de graisse de phoques et de baleines pour pouvoir résister et qu’ils étaient habitués à de telles températures….

Après cette excursion enchanteresse, nous sommes rentrés à Ushuaïa pour aller visiter l’ancien bagne. Alors là, tu comprends mieux toute la signification du mot “bagne” ! Une prison glaciale, sans chauffage et saturée d’humidité, les bagnards nourris au lance-pierre, pas soignés, les travaux forcés… Franchement de quoi le dissuader de transgresser la loi à nouveau si le bagnard en sortait un jour vivant…

Le soir, pour terminer cette grande journée de découvertes, nous avons mangé dans un restaurant typique où nous avons pu notamment déguster la spécialité locale : les crabes et araignées de mer géants. Par précaution, j’ai préféré avaler un antihistaminique avant de goûter ça, de peur de faire une belle réaction allergique comme ça m’était déjà arrivé une fois avec ce genre de bestiole !
Ce jour-là, il y avait des élections nationales : en Argentine, le vote est obligatoire et la veille et le jour de l’élection, la vente d’alcool est formellement interdite dans tous les bars/resto et assimilés !!!! Certains du groupe n’étaient pas très contents de ne pas pouvoir s’enfiler quelques verres dans le cornet pour se réchauffer un peu !

Le lendemain matin, une surprise inespérée nous attendait dans le ciel : un magnifique soleil dans un beau ciel bleu ! Le truc qui n’arrive pas souvent…. Une chance inouïe pour le programme du jour : une mini croisière en catamaran sur le Canal de Beagle (point de rencontre des océans Pacifique et Atlantique) pour découvrir les fjords et les falaises, observer les îles peuplées de phoques et d’oiseaux, et atteindre le Phare des Éclaireurs.

Seule la colonie des manchots migrateurs n’était pas au rendez-vous. Ils n’étaient pas encore arrivés, la faute au réchauffement climatique… Mais notre guide s’amusait à nous dire que de toute façon, on aurait peut-être la chance d’en voir quand on irait au Perito Moreno… Sacrée blagueuse qui s’est bien jouée de notre ignorance de la géographie argentine…

 

 

 

A chaque fois que l’on s’approchait des îles où il y avait des animaux et des oiseaux, l’odeur était insoutenable, à vomir….. Les phoques faisaient un bruit de fou, un mélange improbable entre le cri du chameau et du bouc, quelque chose dans le genre…..

 

Bien que le froid ait été saisissant, cette mini croisière a été absolument géniale, j’ai adoré. Les paysages qui se reflétaient dans les eaux noires du Canal étaient magnifiques.

De retour sur la terre ferme, nous avons déambulé dans l’unique rue marchande dédiée aux bazars à touristes, avant de lever le camp direction l’aéroport pour partir vers la région des glaciers au pied des Andes. Notre avion a décollé avec 40 minutes d’avance ! On n’avait jamais vu ça… Arriver en avance, oui, mais décoller avant l’heure prévue, c’était une première !

En tout cas, les paysages vus du ciel étaient spectaculaires, et ont rapidement changé dès qu’on a atteint la Patagonie et ses immenses étendues de steppe désertique (et non pas de “pampa”, expression employée à tort car la pampa c’est verdoyant en réalité) .

 

[…]

Album photos à feuilleter

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EPILOGUE

– J’ai retenu qu’en Argentine, on y parle…. argentin et pas l’espagnol “castillan”. C’est encore bien plus flagrant qu’en Équateur.
Cela m’a occasionné bien des péripéties pour comprendre et me faire comprendre. D’ailleurs, j’aurais dû tilter dès le départ dans l’avion à l’aller : au moment du repas, les hôtesses proposaient deux choix, et ne sachant pas décrypter ce que c’était que le “pocho”, j’ai pris l’autre plat. Quelle déception quand j’ai vu que cet autre plat c’était du poisson, et que je me suis rendue compte que le mystérieux “pocho” était en réalité du “pollo” (prononcer polio) ! Car en Argentine, le double LL espagnol ne se prononce pas “llieu” mais “CHE”… Encore fallait-il le savoir ! Tout ça nous a bien fait rire, surtout quand on parlait des gauchos et de leurs “cabacho” : les “caballo”, les chevaux quoi !
Et il n’y a pas que des variantes dans la prononciation. Beaucoup de vocabulaire n’est pas du tout le même, dans tout ce qui est alimentaire par exemple : pas pratique quand on veut commander quelque chose de précis…

– Philéas a retenu de l’Argentine que l’aspect “Histoire et civilisations” est presque inexistant, ou tout du moins mis entre parenthèse pour ne pas dire savamment occulté.
Seules les périodes de grandes vagues d’immigrations de la fin du XIXè et début XXè siècle sont “assumées”.
Le passé colonial, à part d’un point de vue architectural à certains endroits, il faut le chercher.
Quant aux cultures Indiennes du côté des Andes, alors là, c’est carrément étouffé. Ce n’est que pour le folklore touristique. Philéas a été très déçu par cet aspect-là…

– Nous avons retenu que l’Argentine est réellement LE pays de la viande ! Ce n’est pas un mythe. La gastronomie est presque exclusivement basée sur la viande, rouge essentiellement. Mais nous avons compris qu’il y a une raison à cela. Ce n’est pas juste une question de goût, c’est d’abord parce les terres argentines sont pour la plupart stériles, rien n’y pousse, et donc ils ne disposent que de très peu de fruits et légumes localement. Pour trouver des zones cultivables, il faut s’approcher des régions tropicales au nord. Mais c’est largement insuffisant pour nourrir tout le pays, et c’est très cher. Et comme ce qui est importé est hors de prix…
Du coup, les argentins se gavent de barbaque, à chaque repas, et à des doses massives. Nos estomacs non habitués à autant d’apports protéiniques n’ont pas supporté bien longtemps. Il n’en reste pas moins que leur super barbecue, les repas “asados”, sont excellents.

Pour aider à digérer tout ça, couper un peu la faim et booster leur métabolisme en carence de fruits et légumes, les argentins boivent à longueur de journée de la “Yerba maté”, l’infusion nationale.
C’est une tisane au goût prononcé, qu’ils boivent selon un rituel précis dans une tasse typique appelée “maté” (une petite calebasse qui ne doit surtout pas être lavée) dans laquelle est plongée une paille métallique appelée “bombilla” (prononcer “bombicha”…) qui filtre l’herbe en aspirant le breuvage. Le rituel se veut convivial car il est d’usage de le déguster à plusieurs en faisant tourner le “maté”, chacun aspirant une gorgée et le passant au suivant. Tout bon argentin qui se respect possède au moins un “maté”. Notre guide française de Salta en avait un “format de voyage” qu’elle faisait suivre partout avec un thermos d’eau bouillante. C’est elle qui nous a initiés à ce rituel.

Trois autres spécialités culinaires sont typiquement argentines :
.- les “empanadas” : ce sont des petits chaussons faits en pâte à pizza, soit cuits au four soit frits (suivant les régions), et généralement farcis de viande de bœuf (évidemment !). Mais il y en a aussi des farcis au poulet, aux épinards (très bons), au maïs (un estouffe chrétien !), au jambon et fromage, ou encore aux oignons, etc etc etc C’est très bourratif…
.- l’incontournable “dulce de leche” !!! Alors ça, c’est une tuerie !!! C’est de la confiture de lait au goût de caramel. J’ai dû me faire violence pour ne pas m’en gaver pendant tout le voyage, car c’est proposé absolument partout et systématiquement à chaque repas.
.- les “alfajores” : c’est LE gâteau national (bien qu’il soit d’origine arabe en réalité). Il s’agit de deux biscuits ronds collés l’un contre l’autre soit avec de la confiture, soit avec du chocolat, soit avec du “dulce de leche”. Le tout est enrobé de sucre ou de chocolat fondu. Bref, c’est très light comme pâtisserie, juste 1000 calories la bouchée… Notre préférence : ceux fourrés au “dulce de leche” et enrobé de chocolat.

POUR CONCLURE…

— Je suis revenue avec la certitude que j’aime vraiment les paysages si grandioses, spectaculaires et variés de la Cordillères des Andes. C’était la deuxième fois que je mettais les pieds dans ce coin du Monde, et je pense que ce ne sera pas la dernière…

— Philéas est revenu avec la (quasi)certitude que ce n’est finalement pas dans ce pays (qu’il idéalisait) qu’on émigrera un jour… En dehors de la capitale, c’est désert, et c’est économiquement beaucoup trop aléatoire. Depuis, il est à la recherche d’un plan B…

— Enfin, nous sommes revenus avec un nouveau record : distance Béziers/Ushuaïa = plus de 12800 kms… Record à battre !!!

C’était définitivement notre voyage jusqu’au bout du monde

 

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récit complet de notre aventure à lire en cliquant sur ce lien

 

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