Parenthèse Berbère au Maroc (en hommage à ma mère)

 
• ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ •
« Il y a quelque chose de plus fort que la mort,
c’est la présence des absents dans la mémoire des vivants. »
[ Jean d’Ormesson ]
• ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ • ∼ •
 
 
 
Ici-bas, vendredi 11 février 2022.
 
 
 
Ma chère Maman,
 
Souviens-toi, il y a vingt ans… déjà… pourtant j’ai l’impression que c’était avant-hier. Le temps passe si vite, c’est effrayant.
Le 11 février 2002, tu jetais définitivement l’éponge en décidant de rejoindre Papa, pour de bon cette fois… Ce funeste lundi soir où, après t’avoir cherchée désespérément partout dans ta maison (avec cet horrible pressentiment me vrillant les tripes), je t’ai finalement retrouvée plongée au fond de ta piscine bâchée. Ce coup-ci, tu n’auras pas pu me répéter l’effroyable « j’ai tout raté dans ma vie, même ma mort ! » que tu m’as balancé après ta précédente tentative manquée (ton “TOUT raté dans ma vie” me hante depuis… “TOUT” y compris ta fille unique donc…). Après pratiquement une vie de luttes intérieures, avec quelques batailles gagnées plus ou moins artificiellement, tu as perdu la guerre contre la terrible mélancolie qui te rongeait inexorablement. Je pensais que la naissance de ta petite-fille t’aurait donné une nouvelle raison de vivre. Comment ai-je pu être aussi naïve ? Je me suis raccrochée à de faux espoirs. Tu as choisi de noyer ton chagrin au sens propre, pas au sens figuré… et accessoirement me laisser seule à devoir supporter l’insupportable, chercher à comprendre l’incompréhensible, à tenter d’expliquer l’inexplicable, à essayer d’accepter l’inacceptable en trouvant des excuses à l’inexcusable. Ton laconique « pardonnez-moi, je me suis plantée. », retrouvé griffonné au crayon à papier en haut de la notification de ta pension d’invalidité (sacré message subliminal !), ne m’a pas été suffisant pour justifier ton adieu…
 
Je ne suis pas très fan des récits larmoyants, et encore moins des commémorations (je n’ai pas besoin de ce genre d’injonction pour penser à toi et Papa chaque jour). Mais, paradoxalement, pour marquer le coup (en ce triste anniversaire), j’ai eu envie de te raconter en photos la petite parenthèse que j’ai faite au Maroc, pays qui t’a vu naître et où tu as vécu les sept premières années de ta vie. Je sais bien que tu ne voulais pas y retourner, mais je sais aussi que, finalement, vers la fin, tu l’avais envisagé. Alors ce récit en images sera mon petit clin d’œil.
 
Pour cette incursion en terres berbères, je ne suis pas allée découvrir Port-Lyautey, ta ville natale (rebaptisée Kenitra depuis). Comme cette escapade fut improvisée au dernier moment, et que l’on ne disposait pas de beaucoup de temps, on s’est contentés de choisir une destination pas trop lointaine avec un vol direct depuis Montpellier. C’est comme ça qu’un beau jour de mai 2017, je me suis retrouvée à Marrakech par un bon petit 43° ambiant bien saturé en humidité ! A tel point que l’on s’est même dit : « non mais on a débarqué à Kaolack avant l’hivernage ou quoi ? ».
 
Je ne m’attarde pas sur l’arrivée à l’aéroport, c’est toujours plus ou moins le même bin’s : c’était la cohue. Les guichets des formalités de la police des frontières étaient pourtant tous ouverts, mais, pour une raison inexpliquée, les queues interminables n’avançaient pas. On a attendu 1h30 pour obtenir un coup de tampon sur le passeport, tampon qui s’est d’ailleurs cassé net quand le flic m’a contrôlée. J’ai préféré n’y voir aucun signe.
 
Une fois dans la navette venue nous récupérer à la sortie de l’aéroport, alors que j’observais, très enthousiaste, tout ce qui se passait autour de nous en traversant la ville pour rejoindre notre hôtel situé en périphérie, soudain je me suis sentie submergée d’émotions. Je n’ai pas vraiment compris ce qui m’a pris. Heureusement, ce sentiment perturbant s’est finalement envolé pour laisser la place à mon indécrottable excès de curiosité.
 
Déjà, l’une des choses qui m’a sauté aux yeux et m’a beaucoup intriguée, ce sont les inscriptions calligraphiques bizarres sur certaines enseignes ou panneaux. On aurait dit comme une sorte d’écriture extra-terrestre de film de science-fiction :   ⴰⵎⵓⵔⴰⴽⵓⵛ.  Tu ne trouves pas ?
Évidemment, tu me connais, comme d’habitude il a fallu que je tire ça au clair en commençant à soûler tout le monde avec mes tonnes de questions en cascade (ça ne s’est pas arrangé en vieillissant, et j’ai même transmis ça à ton petit-fils… j’avoue que ça peut être usant pour les autres). Quelle ne fut pas ma stupéfaction en apprenant qu’il existe un alphabet AMAZIGH, la langue des berbères. Je n’en avais jamais entendu parler ! Et tu sais ce que ça signifie ces signes cabalistiques ⴰⵎⵓⵔⴰⴽⵓⵛ ? MARRAKECH, tout simplement !
Du coup, j’en suis venue à me demander « mais alors, comment ça s’écrit en lettres arabes ? ? » J’ai cherché et j’ai trouvé la réponse sur internet : مراكش.
Par la même occasion, on a aussi rapidement découvert le surnom touristique de la ville : ARNAKECH. Pas de malentendu possible, le décor était planté, on a su à quoi s’attendre. Pourtant, ce qui nous a vraiment frappés, pour un lieu aussi touristique, c’est la gentillesse et la politesse des marocains. Au premier abord, vu comme ça, ce peuple nous a semblé paisible et heureux, très respectueux. A tel point que, mis à part le petit incident diplomatique provoqué bien malgré nous avec les taxis un soir (une bagarre générale a failli éclater parmi les taximans qui se disputaient pour nous prendre… une obscure histoire de règle de priorité imposée par la police), et aussi le mauvais sketch de Philéas avec les charmeurs de serpents (je te raconte ça plus loin), on s’est sentis carrément bien et en confiance, même moi, c’est dire ! Comme quoi, tout peut arriver…
 
Ensuite, autre chose qui surprend là-bas c’est la quantité impressionnante de chats errants rodant partout. J’ai voulu comprendre ce phénomène pour le moins énigmatique. En fait, c’est juste du bon sens : quand il y a des chats, il n’y a pas de rats ! Les populations redoutant une épidémie de peste comme la peste (c’est le cas de le dire), les principaux vecteurs de la maladie (les rats donc) sont tout simplement éradiqués par les chats. Difficile de trouver une méthode plus efficace et naturelle que celle-là, c’est 100% garantie sans produit chimique toxique. Du coup, les toutous ne sont pas trop les bienvenus et ne courent pas les rues.
 
Sinon, d’un point de vue aspect général, j’ai trouvé les constructions harmonieuses avec leurs façades dans la même teinte. J’ai mieux compris pourquoi Marrakech est appelée la ville rose (ou rouge, ça dépend des langues). Bon, enfin… on ne va pas chipoter mais pour la couleur j’aurais plutôt dit “sable tendance ocre”, ça dépend un peu de la lumière du moment de la journée (et ça dépend aussi du quartier… on a vu que ce n’est pas du tout le même rendu dès qu’on sort du “circuit traditionnel” des quartiers touristiques), mais l’idée générale y est. Ces teintes sont dues aux matériaux locaux utilisés pour les constructions. Dans le coin, c’est la terre rouge qui domine. Le gros avantage au moins c’est que les salissures causées par chaque tempête de sable en provenance du désert du Sahara laissent peu de traces sur les façades.
 
 
On a aussi vu quelques trucs insolites :
 

Ne sont-ils pas flamboyants ces vendeurs d’eau ambulants avec leurs outres poilues et leurs pomponettes sur la tête ?
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Durant nos quelques jours de découvertes, on s’est offert, après âpres négociations, les services d’un des (nombreux) guides officiels hantant la ville qui harponnent tous les visiteurs de passage. Face à l’offre pléthorique qui te tombe inévitablement dessus, notre dévolu s’est jeté sur celui qui affichait le plus grand nombre d’années au compteur, l’âge nous paraissant, par expérience, un gage de tranquillité. Comme l’on a bien fait ! Nos deux demi-journées de visites guidées/accompagnées ont été intéressantes, fluides, non contraignantes, agréables car réalisées dans la sérénité et le respect de notre non-désir de se vider inutilement le porte-monnaie en achetant tout et n’importe quoi. Un véritable luxe confortable appréciable (et très apprécié car on n’était pas venus là pour subir… C’est bon, on a déjà donné).
 
 
Le reste du temps, alors qu’on était censés s’adonner au repos et au farniente, on a surtout enchaîné des virées improvisées, dont l’une nous a menés à plus de deux heures de route et ≈160 kms de Marrakech dans les montagnes de l’Atlas, à un peu plus de 1000m d’altitude, à cet endroit-là, regarde :
 
 
Pas mal non ? Ce sont les cascades d’Ouzoud où la rivière chute de 110m de haut, en trois paliers, pour poursuivre sa course en direction des gorges de l’Oued El Abid.
En langue berbère, Ouzoud signifie “olivier”. On comprend pourquoi en arrivant.
 
 
Ce site touristique est très prisé par les locaux. Tout est prévu pour passer du bon temps : attractions aquatiques, zones de baignades, coins sieste, overdose de shopping, bars/snacks/restos, des singes pas farouches un peu partout.
On arrive sur le site par le haut des falaises, là où trône un immense hôtel de “standing” avec vue imprenable. On n’a même pas le temps de se garer sur le parking et de sortir du véhicule qu’une nuée de “guides” se jettent alors sur nous. 
 
 
Pour descendre jusqu’au pied des cascades, deux possibilités, une de chaque côté du canyon : soit par l’escalier et sa centaine de marches puis le chemin bétonné, le tout garni de boutiques de souvenirs impossibles à zapper. Soit l’option que l’on a choisie : randonnée pour descendre à flanc de montagne jusqu’au bord de l’oued, puis atteindre les cascades en longeant la rivière, la traversant par des gués et des petits “ponts” de bois. La remontée vers le village se fait par l’accès escaliers/boutiques.
C’était vraiment une chouette balade au milieu d’un oasis de verdure entouré de montagnes et de paysages arides ocres très photogénique.
 
 
 
 
 
Mais revenons à Marrakech. Nous avons sillonné la ville à travers ces quelques lieux emblématiques incontournables de la ville :
– la médina et la kasbah, de véritables quartiers labyrinthiques remplis des souks débordants de marchandises en tout genre, d’artisans plus ou moins typiques, de nourritures et d’épices, tout ça plongé dans une explosion de couleurs et d’odeurs (après une telle immersion, s’écrier « C’est le souk ici ! » prend tout son sens.) ;
– évidemment, la fameuse place Jamaa El Fna, étrangement calme et désertée le jour mais se transformant soudain, au coucher du soleil, en un bouillonnant cirque à ciel ouvert envahi de stands de bouffes, de marchands de jus de fruits frais, charmeurs de serpents (pas charmants du tout…) ;
– les tombeaux des Saadiens, dynastie ayant régné entre le XVIème et le XVIIème siècle ;
– le somptueux palais de La Bahia construit au XIXème siècle pour les beaux yeux capricieux des femmes du harem d’un Vizir ;
– la très ancienne annexe d’école coranique Médersa Ben Youssef, véritable petit bijou architectural médiéval (fermée pour des travaux de rénovation après notre passage en 2017, elle est rouverte à la visite depuis le printemps dernier) ;
– la grande mosquée (labellisée verte !) de la Koutoubia avec son immense minaret de 69 mètres de haut ;
– l’éblouissant jardin Majorelle, garantissant une déchirure de la rétine et une entorse du nerf optique ;
Bab Agnaou (et ses cigognes sentinelles), l’une des majestueuses portes des remparts de la ville. Elle date du XIIème siècle ;
– l’antique Qoubba Almoravide. Cette étrange tour rectangulaire surmontée d’un dôme serait l’unique monument encore existant de la dynastie des Almoravides, les fondateurs de Marrakech au XIème siècle. Le site, découvert à la fin des années 1940, était encore à l’état de fouilles archéologiques lorsque l’on y est allés. Depuis l’été 2021, il est ouvert au public.
 
Tiens, je t’ai trouvé un plan touristique succin pour localiser la plupart des endroits.
 
 
Comme d’habitude, j’ai pris beaucoup trop de photos… Je t’en montre une large sélection, sans ordre rationnel mais tout de même classée par lieux visités (tu vois, de ce côté-là, je ne change pas trop, je reste une bordélique organisée !).
 
 

 La mosquée de la Koutoubia 

Voilà LE symbole de Marrakech, le site de plus ancien de la ville : sa grande mosquée. Elle peut accueillir jusqu’à 20 000 fidèles. Du haut de son imposant minaret, neuf siècles nous contemplent !
La Koutoubia, aussi appelée la mosquée des libraires, a été bâtie au XIIème siècle alors que la dynastie berbère des Almoravides régnait en maître.
Au sommet du minaret (qui aurait servi de modèle à celui de Séville et de Rabat), trois boules dorées sont empalées sur une longue flèche. Elles symbolisent les trois plus grandes mosquées du monde Arabe : la Kaaba de La Mecque, celle du Prophète à Médine, et Al Aqsa à Al Qods(Jérusalem).
La légende raconte que ces boules sont en or et que des génies veillent farouchement dessus pour empêcher tout vol. Le doute est permis. En tout cas, ce qui est sûr c’est qu’elles sont métalliques, mais là encore, deux versions s’affrontent : soit en cuivre, soit en laiton. Bon, je ne vais pas ramener ma science, étant donné que je ne suis pas du tout une scientifique, mais comme j’ai un avis sur tout (et surtout un avis), voilà ce que je déduis. Le cuivre est de couleur orange/rouge et non pas jaune comme l’or. En revanche, l’alliage du cuivre et du zinc donne un métal jaune, donc évoquant l’or. Et comment s’appelle l’alliage cuivre/zinc ? Du laiton ! CQFD.
 
Sans surprise, on ne peut pas visiter la Koutoubia puisque seuls les musulmans ont le droit de pénétrer dans l’édifice religieux sacré. C’est bien dommage car notre (antique) guide nous a expliqué que monter jusqu’au lanternon surmonté d’un dôme en haut du minaret est une expérience insolite : l’accès ne se fait pas par un escalier de centaines de marches, mais par une longue pente gravissant l’équivalent de sept étages. Le muezzin pouvait même y monter carrément à cheval, une écurie était d’ailleurs aménagée pour l’occasion.
 
 
 
 

 Jamaa El Fna 

 
Toutes les rues finissent par rejoindre le cœur battant et bouillonnant de Marrakech.
Depuis la Koutoubia, il suffit de traverser un grand carrefour puis longer une avenue pour rejoindre THE place to be : Jamaa El Fna.
 
Pendant la journée, rien de vraiment particulier ne se passe sur cette immense place plutôt inerte et désertée, cramée par le soleil implacable et assommée par la chaleur ambiante.
Mais en fin d’après-midi, comme par magie, les prémices d’une effervescence se font sentir puis l’ambiance sort de sa torpeur et se transforme jusqu’à atteindre son paroxysme dès la nuit tombée. Des dizaines de boutiques ambulantes envahissent les lieux : vendeurs de jus de fruits frais (les oranges pressées sont les plus réputées), de fruits secs, de pâtisseries et autres gourmandises locales suintant le gras et saturées en sucres mais diaboliquement savoureuses, des artisans, des tatoueuses au henné. Et puis il y a surtout les stands de bouffe qu’on penserait “improvisés” au milieu de ce joyeux bazar mais qui, en réalité, sont très organisés, numérotés. Tout est fait pour attirer le touriste curieux et affamé jusqu’aux tables installées autour des cuistots s’affairant en plein air. Les rabatteurs te hèlent et te harcèlent en te suivant et te rabâchant « Viens manger chez moi ! Y’a la clim et c’est gratuit… jusqu’à la caisse ! ».
Quand tu penses avoir réussi à déjouer le piège se refermant sur toi, BIM tu te retrouves au beau milieu des dresseurs de singes et autres charmeurs de serpents (j’ai appris qu’en réalité, ces pauvres cobras sont mutilés pour être rendus “inoffensifs” : leurs crochets à venin mortel leur sont arrachés…). Ma PHOBIE… j’ai cru mourir ! Je m’évertuais à les éviter (pour ne pas finir tétanisée par la peur), mais il y en avait un peu partout, au milieu de la foule toujours plus nombreuse et compacte. C’était sans compter Philéas qui a encore brillé ! Je l’avais pourtant prévenu que photographier était payant. Il s’est cru plus malin que les autres, s’est faufilé entre deux groupes et a dégainé (plus ou moins discrètement) son téléphone, pensant passer inaperçu. Et là, c’est le drame ! Un mec lui est tombé dessus pour lui demander de l’argent pour les photos, Philéas lui a dit non, le ton est monté, d’autres mecs sont arrivés et nous ont encerclés. J’ai bien cru qu’on allait se faire dépouiller de tout le cash qu’on venait tout juste de changer, surtout quand Philéas a finalement compris qu’il n’avait pas d’autre choix que d’aligner un bifton pour se sortir de cette délicate situation… et qu’il a sorti toutes les liasses de billet d’un coup… J’ai cru mourir une seconde fois… Il a balancé le pourliche et on s’est enfui de là vite fait bien fait.
 
L’idéal pour observer plus sereinement le grand cirque à ciel ouvert c’est de s’installer sur le toit-terrasse de l’un des cafés-restaurants de la place : la vue panoramique est imprenable (si tu parviens à avoir une table située aux premières loges).
 
 
 
 

 La médina, ses souks, sa kasbah 

Questions pour un champion :
 
– quelle est la différence entre la médina et la kasbah (mis à part cinq des six lettres des deux mots…)
La médina, c’est toute la partie historique de Marrakech située à l’intérieur des remparts. La kasbah, c’est un quartier fortifié dans la médina.
 
– quel est leur point commun ?
Ce sont de véritables labyrinthes où tout non-initié se perd inévitablement dans ses dédales de ruelles étroites et ses souks encombrés de stands débordants de marchandises en tout genre.
 
 
Cet immense capharnaüm est pourtant très organisé, globalement par corps de métiers. Comme dans un gigantesque hypermarché tentaculaire, on peut donc passer des heures à arpenter chaque rayon (se vider le porte-monnaie et remplir ses valises) et admirer le travail des artisans marocains : teinturiers, tapis, huile d’argan, poteries, babouches, vêtements, tissus, cuirs, selleries, bijoux, maroquineries, épices, vanneries, bois, laines, ferronneries, cuivres, instruments de musique, menuiseries, pâtisseries et autres boustifailles.
Petite précision (et pas des moindres) : il faut avoir une patience en béton armé et les nerfs solides pour supporter les sollicitations insistantes des vendeurs/rabatteurs (#euphémisme !). Si l’on n’est pas du tout amateur de ce jeu de dupes, la solution pour s’épargner ce supplice est de s’offrir les services d’un guide officiel. Certes il vous emmène inévitablement dans les boutiques où il obtient sa commission si l’on achète, mais on s’épargne le harcèlement de rue pour sortir les billets.
 
extraction de l’huile d’argan

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 Tombeaux des Saadiens 

Ce sanctuaire est composé d’une succession de tombes, de mausolées dans différents bâtiments entourés d’un jardin. La dynastie Saadienne a régné un peu plus d’un siècle sur Marrakech, de 1517 à 1659. La généalogie des Sultans est affichée dans l’édifice :
  
 
 
 

 Palais de La Bahia 

Il était une fois un Grand Vizir nommé Sidi Moussa qui décida de faire édifier un grand riad, avec jardins et dépendances, au cœur de la médina de Marrakech. Un beau jour, son fils Ahmed Ben Moussa succéda à son père et prit du galon en devenant le régent du tout jeune nouveau Sultan. C’est alors qu’il fut pris d’une folie des grandeurs architecturale. Il acheta une grande partie des bâtiments et parcelles environnants afin de transformer le riad originel en un vaste et somptueux palais, le plus grand de l’époque au Maroc : l’ensemble s’étendait sur huit hectares. Et tout ça pour quoi ? Pour les beaux yeux non pas d’une mais de… vingt-huit femmes ! Il y installa ses quatre épouses officielles, ses vingt-quatre concubines et leurs tripotées de mioches, et vécut comme un pacha entouré de toute sa smala.
L’histoire raconte que le palais porterait le petit nom de sa favorite, la Bahia, qui signifie “la Belle”, “la Brillante”.
 
 
 
 

 La médersa Ben Youssef 

En franchissant l’imposante porte en bronze, seule et unique entrée de l’édifice (pourtant ce n’est pas une prison…), on s’engouffre dans un long couloir juste éclairé par quelques puits de lumière. On sent immédiatement que l’on plonge dans un lieu chargé d’histoire. Il faut dire que ce monument, annexe d’école coranique, existe depuis des siècles. A l’origine, il avait été conçu pour accueillir et héberger jusqu’à 900 étudiants en théologie. Depuis environ un demi-siècle, il ne fait plus office d’internat géant, il est devenu un lieu-musée dédié aux (nombreuses) visites touristiques.
Malgré l’affluence, l’atmosphère qui y règne est particulière, voire même mystique dans certains recoins.
L’architecture est remarquable, le mélange du bois sculpté et des mosaïques est très esthétique.
Autour d’une cour intérieure pavée de marbre blanc et agrémenté d’un beau bassin central (en prévision des travaux, il n’y avait plus d’eau quand on y est allés), on trouve une salle de prière, une salle des ablutions et les 132 chambres réparties sur deux niveaux autour de six petits patios. Bon, ils appellent ça des chambres… mais pour une superficie de 9m² chacune, y entasser jusqu’à 900 élèves (soit 6 à 7 par pièce), je dirai qu’il s’agit plutôt d’un cagibi austère au confort extrêmement spartiate.
 
 
 
 
 
 

 Le jardin Majorelle 

C’est un jardin extraordinaire, un écrin de verdure luxuriant rempli de palmiers, de cactus, de bambous, de plantes tropicales et aquatiques, une oasis insolite aux couleurs éclatantes et à la photogénie indiscutable. C’est l’endroit de Marrakech où tous les touristes se ruent, un passage obligé surpeuplé. Car il paraîtrait que c’est l’un des plus célèbres jardins botaniques au monde, rien que ça !
Et bien nous, (comme souvent) on n’en avait jamais entendu parler… Alors on y est allés pour s’en faire une idée.
On a ainsi appris qu’à l’origine, il a été créé à des fins personnelles par un peintre-aventurier français, Jacques Majorelle (un illustre inconnu pour moi… décidément mon inculture générale me colle aux basques), parti s’expatrier au Maroc au début du XXè siècle.
Deux grosses décennies plus tard, le site ouvre au public, les recettes des tickets d’entrée à la visite permettant de financer les coûts d’entretien exorbitants.
Dans les années 1970, un vaste projet hôtelier a bien failli faire disparaître le jardin, sauvé in-extremis par le couple Yves SAINT-LAURENT Pierre BERGÉ : ils sont parvenus à le racheter en 1980.
Le site hébergera le musée d’Art Islamique remplacé plus tard par l’actuel musée Berbère.
Les cendres du célèbre couturier français y sont répandues, un mémorial à sa mémoire trônant dans un coin du jardin.
 
L’esthétique éblouissante du lieu est indéniable, les couleurs vives sont un enchantement pour mes yeux. Le fameux bleu est devenu une couleur au nom déposé : le bleu Majorelle.
Le revers de la médaille c’est l’affluence touristique, le site est victime de son succès. Et je ne parle même pas du cirque des instagrameurs venus là dans l’unique but de chasser la meilleure place pour faire leur (pire) photo avec filtre (alors qu’il n’y en a vraiment pas besoin).
J’ai trouvé l’endroit magnifique, très bien entretenu, je n’ai pas été déçue. Philéas, quant à lui, n’a pas du tout été emballé par la visite qu’il a trouvée très chère pour ce que c’est, à commencer par le prix du touk-touk qu’on a pris juste pour y aller ; son retour d’expérience tient en trois mots : « Une belle arnaque ! ».
 
 
 
 
Il y aurait encore pas mal de choses à faire et à voir à Marrakech, mais ce sera pour une prochaine fois. Et quand on y retournera, on tâchera de loger dans l’un des innombrables riads, les fameuses demeures urbaines traditionnelles marocaines, avec patio et parfois jardin intérieur, nichées au cœur de la médina. Au printemps 2017, notre escapade était un peu précipitée, alors Philéas avait réservé le seul bon plan disponible qu’il avait dégoté. Et quel bon plan ! On n’a pas été déçus : on est tombés dans un hôtel de standing, situé dans la palmeraie à quelques kilomètres du centre ville. C’est devenu le quartier résidentiel haut de gamme de Marrakech. Mais à l’origine, l’histoire raconte que quelques 100 000 palmiers ont été plantés sur une superficie d’environ 15km² à l’époque des Almoravides au XIIè siècle.
Aujourd’hui, la palmeraie est beaucoup moins vaste et arborée, mais des programmes de reforestations seraient en projet.
 
 
 
Bref, notre hôtel était digne d’un conte des mille et une nuits. Pourtant tu sais à quel point on est du genre à fuir tout ce qui brille, mais là, une fois n’est pas coutume, on doit avouer que l’on n’a pas boudé notre plaisir. Regarde !
 
 
 
Tu vois, on a su profiter d’une opportunité quand elle s’est présentée, tant qu’il est encore temps… Et j’espère que de ton côté, là où tu as décidé d’aller, tu as enfin trouvé la paix…
 
 
 
 
 
 
< TOP >
 
 
 
 
 
 
 
 
 

4 Comments on “Parenthèse Berbère au Maroc (en hommage à ma mère)

  1. C’est un bel hommage à ta maman.
    Toutes tes photos avec leurs belles couleurs donnent à ton billet une certaine douceur.

  2. Bel hommage. Je t’envoie plein de câlins réconfort.
    Autrement tes photos sont magnifiques et ça donne vraiment envie d’aller au Maroc, surtout cette escapade dans l’atlas. Ce qui me rebute c’est, comme dans tout endroit touristique à travers le monde, la foule et tous ces rabatteurs. Je déteste ça.
    Mais bon qui sait, un jour peut être je me laisserais quand même tenter.

    • Merci Martine
      Moi aussi je déteste le cirque touristique… ceci dit, pour Marrakech et Ouzoud, je ne regrette pas, ça valait la peine, d’autant qu’on avait réussi à limiter les dégâts.

Répondre à Martine Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *