Les massages en Thaïlande ??? Supplices sous les cocotiers…

 
 

De tous les endroits visités dans le monde, le plus à l’Est de la planète où nous étions allés jusqu’alors était l’île de La Réunion dans l’océan Indien. Nous n’avions encore jamais mis les pieds en Asie. Et pourtant Philéas rêvait de ce continent depuis tellement longtemps. Plusieurs destinations asiatiques figurent dans sa (très longue) liste d’envies de voyages.
C’était prévu… Un jour, c’était sûr… Mais quand ?

ประเทศไทย

En définitive, c’est un couple d’amis qui a réussi à nous convaincre de concrétiser. Ils nous ont proposés de partir avec eux pour une parenthèse « convivialité, détente et découverte » au bord de la mer d’Andaman sur l’île de PHUKET en THAÏLANDE, pays pour lequel ils avaient eu un gros coup de cœur quelques mois auparavant lors de leur précédent voyage.

 
Pour être tout-à-fait honnête, la Thaïlande n’était pas vraiment dans le « top 5 » de nos destinations envisagées immédiatement. Les hauts lieux du tourisme de masse mondial, à la réputation sulfureuse en plus (pour ne pas dire graveleuse), nous rebutent en général. Mais en fin de compte, nous nous sommes laissés persuader d’oublier tous nos à priori…
Finalement, c’était aussi l’occasion de faire connaissance avec la terre natale et la culture d’origine de ma tante Thaïe. Alors après tout, pourquoi pas ?
Sur ce, comme Philéas ne fait jamais les choses à moitié dès qu’il s’agit de voyager, il s’est dit que tant qu’à partir à la découverte du pays du sourire, autant y retourner dans la foulée.
A peine quelques semaines après notre premier séjour, nous sommes donc repartis là-bas, mais avec nos kids cette fois, pour un circuit à travers d’autres régions.

 
C’est ainsi que fin 2015, pour notre plus grand plaisir, Philéas et moi avons posé à deux reprises nos valises au Royaume de SIAM.
Par la même occasion, ce fut aussi le bonheur suprême ? d’engloutir un cumul d’environ 40 000 kms parcourus à vol d’oiseau, de digérer grosso modo un total de 52 heures d’avions proprement dit (donc sans compter les temps d’escales, les retards, etc…), et de savourer quatre fois les joies du jetlag.
 
 
Pour le premier voyage, sur l’île de Phuket, chacun attendait le jour du départ comme le messie, l’épuisement était généralisé. Le besoin unanimement partagé de décompresser se faisait plus que pressant.
 
Comme d’habitude (sinon ce ne serait pas drôle !), Philéas et moi n’envisagions pas les choses tout-à-fait de la même manière…
Cette fois, je souhaitais juste recharger mes batteries en m’adonnant à fond au farniente pour casser le rythme des contraintes. Je comptais aussi fermement pouvoir contempler les paysages inédits que j’allais découvrir pour la première fois et les photographier.
Lui n’aspirait qu’à se vider la tête et ne voyait son salut qu’au travers de la promesse d’une cure intensive de massages, spécialités locales dont on m’avait rabattu les oreilles depuis des mois !
S’il y a bien (encore) un goût que nous n’avons absolument pas en commun, c’est celui des massages !!! Alors que je déteste ça, lui adorerait se faire masser matin, midi et soir… Ben voyons ! Son idée fixe ne pouvait virer qu’à la lubie…
D’autant plus que Laurent et Sylvie, nos amis, étaient aussi des fans absolus de la palpation à la sauce thaïe et trépignaient d’impatience de pouvoir à nouveau se faire tripatouiller le râble quotidiennement au bord de la plage sous les cocotiers…

Forcément, à trois contre un, je ne pouvais pas lutter : le fil rouge de ce premier séjour aura donc été le MASSAGE? !

 

 

NDLR – Que les esprits lubriques mal tournés passent leur chemin, ce récit ne parle absolument pas de la prostitution se cachant derrière les pseudo massages dits “avec Happy Ending” destinés aux obsédés du bulbe (je ne ferai pas un dessin). 
Depuis longtemps, la Thaïlande se traîne une sale réputation avec le tourisme sexuel qui la gangrène. Certes c’est une triste réalité, mais, comme bien souvent, l’arbre cache la forêt…
J’ai été extrêmement choquée par ce que j’ai pu voir là-bas, comme par exemple la quantité inouïe de “Lady Boys” dans la région de Phuket.
Pour autant, maintenant que je suis allée au pays du sourire, je trouve vraiment injuste de réduire la Thaïlande à ça…

 

Dès le lendemain matin de notre arrivée nocturne à Surin Beach, petit coin de paradis à l’Ouest de l’île de Phuket, la principale préoccupation fut le repérage des “salons” de massage en plein air au bord de la plage.

c’était pas dégueu Surin Beach quand même…

Il n’a pas fallu longtemps pour en trouver, il y en a presque tous les 20 mètres ! Les massages proposés (différents types et durées de oil massage, ou bien le thaï massage traditionnel) et les prix pratiqués étaient à peu près les mêmes partout. La différence s’est donc faite sur la fréquentation de l’atelier pétrissage en plein air, un bon indice d’évaluation de la qualité des prestations/satisfaction de la clientèle.

Bref, moins de 24 heures après notre arrivée, Philéas était déjà à l’horizontale sous les parasols et les cocotiers, pour un oil massage d’une heure. Généreusement huilé de la tête aux pieds par les mains expertes (et puissantes) d’une des masseuses, il se transformait lentement mais sûrement en beignet bien gras. Au fur et à mesure que ses tensions se dénouaient, il me marmonnait qu’il fallait absolument que j’essaie moi aussi… Sa somnolence et son air béat ne laissaient absolument aucun doute sur le bonheur intense qu’il avait à être là, ici et maintenant !

Après quelques séances d’essais, nos Hommes ont finalement jeté leur dévolu sur un “stand” où sévissaient notamment deux masseuses Thaïes pur jus Hui et Nong, deux prénoms “exclamatif” prédestinés pour celles qui distribuaient autant de bien-être (ooh Hui) que de douleur (ooh Nong) ! En voyant leur allure inoffensive, on ne se serait jamais méfié d’elles. Mais ces (redoutables) petits bouts de femme, à la force phénoménale insoupçonnée, sont capables de manipuler le corps de n’importe quel touriste, y compris ceux au gabarit massif et imposant. Ne jamais se fier aux apparences…

Le rituel/planning des massages a été mis en place dès le premier jour : (au moins) un oil massage (de minimum une heure) par jour, sinon rien.

Dans le même temps, la lancinante rengaine à mon égard a débuté :
《 ➖ il faut absolument que tu essaies ! Tu ne peux pas venir en Thaïlande et ne pas tester l’une des spécialités locales, c’est pas possible !!! 
➖ non merci ! Je déteste me faire tripoter par des inconnu(e)s. En plus, il y a du sable partout, ça gratte, et avec tout ce gras, ça colle c’est dégueulasse… Et puis j’ai mal partout, je ne vais pas le supporter.
➖ mais non, justement, ça va effacer toutes tes douleurs au contraire, c’est fait pour ça ! 
➖ …???… 》

Chaque jour, nos Hommes surveillaient fébrilement leur montre (un comble en vacances…) pour ne surtout pas rater l’heure de leur massage… ni l’heure de l’apéro (mais c’est un autre débat ?…) !!!

Une fois, Philéas a voulu tenter le véritable Thaï massage.
Il n’avouera jamais clairement qu’il aurait mieux fait de s’abstenir ce jour-là. Mais la nuit d’intenses souffrances physiques qu’il a passée suite à cette séance a parlé pour lui de toute façon. Il n’a plus pu nier… Il a juste fini par reconnaître à demi-mot que “ça”, ce n’était pas fait pour lui…
Pourtant, quand il a débarqué en demandant le fameux Thaï massage de renommée mondiale, la réaction de la masseuse affectée à la tâche (une petite dame d’un mètre cube et d’un certain âge) aurait dû lui mettre la puce à l’oreille. Elle a ouvert grand la bouche et les yeux, dubitative, comme pour lui dire 《 es-tu vraiment sûr que c’est ce que tu veux ? 》. Puis elle a éclaté de rire, lui a pincé le gras du bide, palpé la peau des bras, appuyé par à-coups sur les épaules comme pour lui signaler qu’il manquait de suffisamment de viande autour des os pour pouvoir manipuler la bête sans la transformer en steak haché !!!

En théorie, l’objectif du Thaï massage traditionnel est de libérer le corps de toutes ses tensions et ses blocages, et d’évacuer tout le stress et les toxines accumulés.

En pratique, le but du jeu pour la masseuse a été de plier Philéas (le massé-supplicié) dans absolument tous les sens jusqu’à parvenir à lui faire prendre la forme d’un bretzel… 

Mais avant d’en arriver là, elle a dû le travailler au corps, c’est le moins que l’on puisse dire, car il lui a donné du fil à retordre ! Pour parvenir à ses fins, elle s’est acharnée sur les articulations de ses genoux en y appuyant fort dessus et en y plantant les doigts, en tirant ensuite sur ses jambes comme si elle cherchait à l’écarteler. Vu le corps de mon athlète, c’était pas gagné… Mais contre toute attente, elle a quand même réussi à lui remonter les talons jusqu’au niveau du nombril côté face, et jusqu’au-dessus du coccyx côté pile (on aurait dit une grenouille le pauvre), ce qui est un véritable exploit quand on sait que Philéas est moins souple qu’un manche de pioche !
La masseuse-tortionnaire a fait subir le même sort à chacune de ses autres articulations. Elle les a méticuleusement déboîtées les unes après les autres. J’ai eu peur qu’elle ne me restitue ma moitié en kit, entièrement désarticulé !

Hui et Nong, les deux masseuses “chouchou” attitrées, n’ont pas raté une miette de cette scène tragi-comique. Elles étaient mortes de rire et ne s’en cachaient absolument pas.

La séance a également été rythmée par des manipulations “sportives” dignes d’un atelier pour contorsionniste, où la pétrisseuse utilisait ses coudes, ses avant-bras, ses pieds, ses genoux et même son corps tout entier. Philéas est passé à deux doigts de la dislocation !
Les opérations “démembrements/luxations” se sont conclues sur des salves de coups vifs prodigués avec la tranche des mains et des doigts sur certaines zones du corps, comme si la décortiqueuse voulait réanimer le supplicié à l’agonie…

Malgré cette expérience littéralement traumatisante pour son corps, il a continué à se faire abondamment masser sous les cocotiers (mais pas le thaï massage, plus jamais ça….), et à me seriner que je devrais VRAIMENT essayer…

J’aurais dû écouter mon instinct et ne pas céder…
Car oui, j’ai fini par céder, “à l’usure”, au bout de quelques jours.
En compagnie de Sylvie, j’ai testé le body oil massage d’une heure, pensant que ce serait le plus soft… Pour moi, ce fut un supplice du début jusqu’à la fin !
Ces quelques dessins humoristiques résument assez bien certaines de mes sensations…

 

Le rendez-vous (fatidique) fut pris pour une fin d’après-midi, après notre séance “baignade dans une mer bleu turquoise à 30° / rôtissage sous le soleil des tropiques / cuisson à l’étuvée sous les cocotiers” du jour, et juste avant l’heure (incontournable) de l’apéritif Happy Hour sur le front de mer.

En sueur à cause de la chaleur humide suffocante qu’il faisait en cette fin de saison des pluies, emballée dans mon paréo vert pomme du plus bel effet, le corps salé comme une morue par les bains de mer, les pieds panés de sable, je suis arrivée au “salon” tendue comme une arbalète.

Chacune de nous deux s’est vue attribuer une masseuse et une table matelassée.
La séance a commencé par un désensablage en règle des pieds, au moyen d’une serviette éponge imbibée d’eau (et de tous les miasmes, mycoses et verrues plantaires de tous les vacanciers précédemment essuyés à la chaîne avec la même serviette…). Après quoi, la masseuse m’a fait comprendre par des gestes (faute de pouvoir communiquer dans une langue commune) que je devais m’allonger sur le ventre en premier. J’ai alors tenté de lui demander d’y aller molo car j’avais vraiment des douleurs un peu partout. Mais la barrière de la langue a été infranchissable…

Je me suis alors calée sur le matelas et j’ai tenté de me détendre en me persuadant que tout se passerait au mieux.
Philéas se foutait de ma gueule, immortalisait la scène en photo ; on rigolait, tout allait bien.

Mais j’ai déchanté à l’instant même où elle a lancé les hostilités : elle m’a attrapé un pied et a planté tellement fort ses doigts dans ma voute que j’ai manqué m’étouffer en retenant un cri de douleur ! Comme entrée en matière, on pouvait difficilement faire pire. Dès le départ les choses ont été claires pour moi : j’allais en chier jusqu’au bout !!!

Elle m’a pétri les voutes plantaires (il paraît que toutes les terminaisons nerveuses du corps s’y trouvent… JE CONFIRME !), les talons (je ne pensais pas qu’on puisse ressentir une telle décharge douloureuse à cet endroit) et les orteils (je n’étais même plus très sûre de n’en avoir que 10) avec une telle puissance que lorsqu’elle en a eu fini avec cette partie de mon corps, un immense soulagement m’a envahi. J’ai eu l’impression que mes pieds (suintant l’huile) avaient été décortiqués et transformés en chair à saucisse. Je me demandais si j’allais pouvoir me remettre debout et marcher après ça…

Vint le tour des chevilles, des mollets, des genoux, des cuisses. A ce stade de la manœuvre, j’ai eu la sensation qu’en réalité elle désossait une carcasse de barbaque, qu’elle m’attrapait chaque tendon, chaque ligament, pour jouer de la harpe avec avant de me les replacer au bon endroit. On aurait dit qu’elle prenait un malin plaisir à décoller chaque muscle pour les malaxer vigoureusement avant de les relâcher presque tétanisés. Les crampes aux jarrets me pendaient au nez.

Le supplice s’est poursuivi en remontant zone par zone, sadiquement, méthodiquement, sans pitié, sans répit.

Bassin, dos, épaules ensuite. J’avais l’impression d’avoir des mains graisseuses partout. C’était tellement enveloppant que j’ai même cru un instant qu’elles s’y étaient mises à plusieurs. La palpation était profonde, puissante, et éprouvante pour mes lombaires. Il y a eu des moments où j’ai dû me mordre les lèvres et retenir mon souffle tellement c’était désagréable pour moi. Je ne comprenais pas (et je ne comprends toujours pas) comment tant de gens peuvent adorer ces massages ! A moins d’être un brin maso…
J’ai préféré rester la tête enfouie entre mes bras sur le coussin, des fou-rires nerveux commençaient à monter…

Toujours au niveau du râble, j’ai soudain senti que les opérations s’intensifiaient. Comment une si petite créature pouvait avoir une telle force de pression ? C’est alors que j’ai tourné la tête du côté de ma voisine de table de torture et là, j’ai compris ! La masseuse était carrément debout sur Sylvie et la piétinait allègrement en rigolant. Je subissais le même sort… Je grimaçais de douleur ; la masseuse d’à côté a dû s’en apercevoir car elle a dit quelque chose en thaï à la mienne, suite à quoi celle-ci est descendue de mon dos et la pression des pétrissages s’est adoucie.

Après le recto, place au verso. Et les manœuvres ont recommencé de bas en haut. J’ai découvert des muscles dont je ne soupçonnais même pas l’existence ! 
Quand elle en est arrivée aux mains, curieusement j’ai trouvé que ce n’était pas trop désagréable. J’ai surtout trouvé incroyable ce qu’elle est arrivée à en faire, à les tourner et les plier dans tous les sens, à faire craquer l’une après l’autre chaque phalange, chaque articulation (je ne me rappelais plus qu’on en a autant !). J’ai eu la sensation que mes mains avaient doublé de volume et que mes doigts s’étaient démultipliés.

La dernière partie à passer à la palpation a été la zone “cervicales/crâne“. Inutile de préciser qu’il ne vaut mieux pas sortir de la douche ni de chez le coiffeur avant d’aller là… car quand on en repart, on a les cheveux hirsutes, emmêlés et aussi grassouilles que si on les avait plongés dans une friteuse ! Ceci dit, le massage du cuir chevelu a été néanmoins ce que j’ai le moins détesté.
La masseuse a terminé la séance par une succession de coups vifs qu’elle a portés avec ses mains jointes sur les côtés de mes jambes, sur mes bras et dans mon dos, le signal que le moment de la délivrance était imminent…

En me relevant péniblement de la table, je ne savais pas si je devais éclater de rire ou fondre en larmes. Philéas, hilare, n’a rien trouvé de mieux à me dire que ce n’est que la seconde fois (qu’on passe sur la table de torture) que c’est agréable, et donc qu’il fallait obligatoirement faire un second massage pour vraiment ressentir les bienfaits…

Je n’étais qu’une immense douleur en partant de là. Le lendemain, je n’étais plus qu’un tas de courbatures et j’avais l’impression de porter un corset me bloquant le dos.

J’ai quand même hésité avant d’en remettre une couche le surlendemain.
On a fait une dernière séance tous les quatre en même temps, les uns à côté des autres, alignés comme des cadavres sur des tables d’autopsie ?.
A un moment, j’entendais Philéas soupirer de bonheur pendant que Laurent lui lâchait un 《 oh oui sur les lobes, putain que c’est bon sur les lobes !!! 》 alors que Hui et Nong, monopolisées pas nos deux lascars depuis le début du séjour, en arrivaient au crâne…

Pour moi, ce fut effectivement un peu moins douloureux. De toute façon, mon corps était déjà complètement endolori et ankylosé, donc je vois mal comment ça aurait pu être pire… Il faut dire aussi que le changement de masseuse au beau milieu de ma séance a également contribué au “soulagement”. Je pense que la première n’y était pas allée de main morte !
Mais quoi qu’il en soit, pour moi, les massages en Thaïlande, ou n’importe où ailleurs, c’est PLUS JAMAIS ! Je déteste ça, il n’y a plus aucun doute !

En revanche, pour Philéas et Laurent, ce n’était pas encore terminé…
Le jour du retour, alors que nous tournions en rond pendant des heures dans les boutiques du hall des embarquements de l’aéroport de Phuket, ils sont passés devant une petite boutique proposant entre autre des foot massage. Ils se sont alors dit que ce serait chouette de se faire masser une dernière fois avant de décoller.
Grand mal leur en a pris… Leur foot massage s’est révélé être une véritable boucherie. Laurent en a d’ailleurs pondu un récit haut en couleurs, intitulé 《 En vadrouille à l’aéroport de Phuket. 》. Ce retour d’expérience (douloureuse) est retranscrit en fin de récit.

 

Qu’on ne vienne plus jamais me parler des bienfaits extraordinaires des massages en Thaïlande !
De retour à la maison, mes douleurs ont perduré… Il m’a fallu deux séances d’ostéopathie pour réussir à tout me remettre d’aplomb (bassin dévié, trois vertèbres déplacées…) !!!
Ce qui n’a pas empêché Philéas de vanter à tout bout de champs les mérites de ces massages, y compris à Estelle et Anthony avec qui nous sommes repartis quelques semaines plus tard pour les fêtes de fin d’année.

Comme ce second voyage était un circuit, Philéas n’a pas eu autant de temps qu’à Phuket pour se faire masser. Toutefois, il a réussi à s’en offrir quelques uns, et a même initié Estelle ! Anthony était un peu trop jeune pour ça.

D’abord à Chiang Maï, au Nord de la Thaïlande, lors de l’une de nos balades le soir sur les “marchés nocturnes de Noël”, Laurent a convaincu Estelle d’essayer un foot massage d’une demi-heure dans un des nombreux stands de rue.

Estelle s’est sentie très mal à l’aise dès le départ. Elle ne semblait pas vraiment apprécier se faire malaxer les pieds. Pour couronner le tout, les masseuses étaient aussi souriantes qu’une pierre tombale (là encore, je pourrais en dire long sur les sourires soit-disant omniprésents au pays du sourire ! On a trouvé ça très survendue comme réputation franchement…).
Bref, elle a été soulagée quand la séance s’est enfin terminée.

En revanche, le lendemain matin, Estelle n’était pas contente en se réveillant ! En se levant, elle s’est écriée énervée : 《 Non mais c’est une blague ! C’est plus des pieds que j’ai là, c’est deux briques en 43 fillette ! Super pour le trek de demain !!! Merci Papa… 》.

Un autre soir, Philéas s’est offert un body oil massage d’une heure. Quel ne fut pas sa déception quand il s’est retrouvé allongé par terre, à se faire pétrir et piétiner par un homme sec comme une trique et désagréable au possible.

Il aurait beaucoup aimé aller se faire masser par les prisonnières du centre pénitencier pour femmes de Chiang Maï, une spécialité un peu particulière mais vivement recommandée. Malheureusement, nous avons manqué de temps. Mais la prochaine qu’on retournera là-bas, il tentera l’expérience !

Enfin, la dernière étape de notre circuit était sur l’île de Kho Chang, deuxième plus grande île de Thaïlande, située près de la frontière avec le Cambodge.
L’hôtel sur la plage de Klong Prao où nous résidions disposait d’une armée de masseuses à la disposition des vacanciers.
J’ai catégoriquement refusé de tenter l’expérience à nouveau, c’était hors de question. Alors forcément, Philéas a voulu qu’Estelle essaie avec lui un body oil massage d’une heure cette fois-ci.

La pauvrette… Elle s’est faite malmenée par une brute épaisse qui n’y est pas allée avec le dos de la cuillère.
Même Philéas, d’abord agacé parce que sa fille n’aime pas non plus se faire pétrir comme de la pâte à modeler, a été obligé d’admettre qu’elle était tombée sur une tortionnaire quand, le lendemain, il s’est fait démonter à son tour par cette furie !

 

 

ÉPILOGUE :

Jusqu’à la fin de notre séjour familial à Klong Prao, Philéas a continué à somnoler sous les cocotiers en se faisant palper/huiler par d’autres pétrisseuses plus douces.

Mais, de son propre aveu, il n’a jamais retrouvé la qualité des massages prodigués chaque jour par  Hui et Nong à Phuket la première fois…

 

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En vadrouille à l’aéroport de Phuket


(Les personnages sont : Philéas Fogues, grand voyageur en puissance et en hommage à Verne Jules, un ami à lui… Et moi-même, Laurent Pull.)

 

             Arrivés avec près de quatre heures d’avance pour le vol vers Dubaï, après avoir enregistré les bagages, fait les badauds dans les “duty-free” et bu une énième bière Singha, las d’attendre sur des chaises inconfortables au milieu de voyageurs fatigués, jaunes et bridés pour la plupart, il nous vint l’idée saugrenue, ou plutôt saute et grenue, d’aller comparer la qualité des massages dans l’aéroport avec ceux qui nous avaient été prodigués par nos masseuses préférées Hui et Nong (ça ne s’invente pas !) sur la plage de Surin, tous les matins des huit jours précédents.

              Nous voilà donc, Philéas et moi-même, devant l’unique salon de la zone d’embarquement, qui ne propose (première désillusion) que des massages dos, tête et cou, ou pieds, à un tarif certes plus onéreux que d’habitude, mais bon, c’est le dernier, on est en partance et on veut savoir.
              Nous choisissons donc les pieds, payons pour une demi-heure et entrons dans le lieu de nos aventures. Là, point de nos lits habituels mais des fauteuils de dentiste serrés, avec des escabeaux devant. Nous nous asseyons dans un coin, l’un à côté de l’autre, et attendons dans un silence de mort. D’un seul coup, nous voyons arriver, depuis une porte improbable, deux petits pitbulls, sûrement des sœurs, avec des visages fermés, toutes les deux habillées de noir avec une bande orange au milieu, sûrement pour leur conférer un peu d’humanité.
              Sans un mot, elles attrapent (et le mot est faible) nos pieds dénudés et entreprennent de les laver, ou plutôt de les blanchir, dans une eau avoisinant les 70 degrés, puis elles les frottent délicatement à l’aide d’une brosse en fer et du savon noir. La fermeté qu’elles mettent à l’ouvrage les éloigne lentement, mais sûrement, de toute idée de féminité Thaïe. D’ailleurs, ce ne sont pas des Thaïes mais les sœurs cadettes de Pol Pot qui, pour échapper aux représailles après le génocide cambodgien, ont trouvé refuge dans cette zone libre et sont devenues décortiqueuses de pieds après avoir fait un stage, long et réussi, de démembreuses de porcs à mains nues dans un grand abattoir thaïlandais.

              Elles sont petites et larges, et leurs mains commencent à entrer en action sur nos pieds qu’elles ont bloqués et qu’elles entreprennent de malaxer avec force, comme pour prévenir de ce qui va leur arriver très bientôt.
              La mienne porte des lunettes épaisses et ses yeux, ou plutôt les fentes de ses yeux, que j’aperçois derrière les culs de bouteilles, ne me disent rien de bon quant à l’issue du combat qu’elle va livrer à mes pauvres orteils.

              Ça y est, c’est parti. Elle entreprend de tordre mes pieds vers l’intérieur afin de voir mes talons, tout cela sans que mes genoux ne bougent. Ses doigts épais et forts jouent sur les articulations tarsiennes, métatarsiennes, calcanéennes et sûrement bien d’autres encore. Je ne savais pas que mes pieds pouvaient parler et émettre autant de craquements.

              Je me tords les lèvres afin de ne pas crier et de ne pas donner à ma tortionnaire les espoirs d’une courte victoire. Je me tourne vers Philéas : il est arcbouté sur son siège. Je ne sais pas s’il rit et je ne suis pas sûr non plus qu’il ne pleure pas en silence, les doigts de sa nouvelle amie crochetés dans son mollet droit, le faisant curieusement ressembler à une saucisse de Morteau sur le point d’éclater.

              Je regarde ma montre : dix minutes seulement sont passées. J’ai l’impression d’être là depuis deux ans.
             Nos deux bourreaux se mettent à parler, à chuchoter plutôt. Je ferme les yeux, les pales du ventilateur au-dessus de nos têtes amplifient ces piaillements à nos pieds. Et ça y est, d’un seul coup nous sommes au Vietnam, c’est Apocalypse Now. Je crie “non Bobby, accroche-toi !”, mais la réalité revient au galop quand ma bourrote (je ne sais pas si ça se dit, mais ça lui va si bien) entreprend de me faire rentrer les ongles plus loin dans les orteils à l’aide d’un morceau de bois qu’elle enfonce ensuite délicatement dans ma voûte plantaire, à différents endroits, son visage n’exprimant absolument rien. Elle fait ce qu’elle doit faire, c’est tout, sans brutalité mais avec une fermeté et une ardeur qui forcent l’admiration.

              L’horloge rythme le temps, trop lentement à mon goût (que je n’ai plus). J’ai l’impression que mes jambes s’arrêtent à mes genoux. Mon pied gauche, qu’elle a délaissé pour s’attaquer au droit, pend lamentablement dans le vide, agité de spasmes que je ne contrôle pas.

              A mes côtés, Philéas sanglote doucement, ou hoquette, ou râle, je ne sais pas. Le temps est suspendu. Mamie Pot me termine en me frappant, avec beaucoup d’énergie, du tranchant de sa main sous ma plante des pieds et sur mes tibias. Son allégresse fait plaisir à voir ; c’est d’ailleurs mon seul plaisir ici, je ne sens plus rien. Mes yeux sont rivés à ma montre qui va nous libérer : ça y est, c’est la fin…

              Au milieu d’un filet de bave, nous les remercions vaguement, empaquetons nos pieds gras et tuméfiés dans nos chaussures sans les lacer, et partons du salon, accrochés l’un à l’autre avec l’impression de marcher sur des poufs !

              Oui nous reviendrons à Phuket, mais pas là….

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2 Comments on “Les massages en Thaïlande ??? Supplices sous les cocotiers…

  1. Bravo et merci pour votre humour et votre description très imagée j’ai beaucoup rit.

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